Maladies parodontales et implantologie

Comment remplacer de façon pérenne les dents malades d'un patient souffrant de parodontite par des implants dentaires?

Gestion du plan de traitement
 

Maladies parodontales et implantologie – Gestion du plan de traitement

Auteurs :  Dr Ammanou Terence et Dr Ammanou Yvon

Dr Ammanou Terence
Chirurgien-dentiste DFCDP
DU d’Implantologie de l’Université d’Evry
Attaché à l’hôpital de Gonesse
CES de parodontologie
Lauréat de l’académie de chirurgie dentaire
Master   en parodontologie
Master 1 en recherche mention BCPP

Dr Ammanou Yvon
Chirurgien-dentiste DFCDP
Post Graduate of New York University
Diplômé d’études supérieures en odontologie chirurgicale
Diplôme universitaire d’implantologie orale et             maxillo-faciale
Diplômé de parondontologie

 

Mots clefs :
Dental implant, periodontal disease, bone loss, complications, osseointegration, pathology, peri-implantiti.

 

Introduction

Les maladies parodontales sont définies comme des maladies inflammatoires multifactorielles, d’origine infectieuse, spécifiques d’un site et d’un individu, sous la dépendance du système immunitaire. Celles-ci sont des lésions innées ou acquises du tissu de soutien de la dent. Selon Armittage et collaborateurs en 1999, les maladies parodontales sont classées en 8 catégories. Les gingivites sont des réactions inflammatoires réversibles du parodonte superficiel, caractérisées par une gencive rouge, lisse et œdématiée. A l’inverse, les parodontites sont des infections irréversibles du parodonte profond qui entraînent une destruction des tissus conjonctif et osseux. Elles constituent la cause majeure de perte dentaire chez l’adulte (Flemming et coll. 1999). Le but de cet article sera de comprendre comment remplacer de façon pérenne par des implants dentaires les dents manquantes chez un patient ayant une parodontite.


Chronologie du plan de traitement

Il sera le suivant :

  •  Examen clinique è diagnostic et pronostic
  •  Evaluation et contrôle des facteurs de risques :Tabac, Diabète, HTA, obésité…
  •  Prophylaxie
    • Enseignement à l’hygiène, détartrage
    • Elimination des caries et des restaurations iatrogènes, extractions
  •  Phase non chirurgicale (curetage radiculaire)
  • Réévaluation à 2 mois +/- une phase chirurgicale parodontale correctrice
  • Réévaluation à 2 mois
  • Phase implantaire
  • Maintenance

Chez des patients ayant des lésions parodontales en phase active, les implants sont rapidement colonisés par des agents pathogènes. L’élimination de ces lésions et le suivi des patients sur du long terme en amont de la mise en place d’implants est un facteur décisif du succès du traitement.


Pronostic implantaire

Dans la population générale, on compte 5% de perte d’implant à 5 ans (Revue de Berglundh et Coll 2002). Chez les patients ayant un ATCD de maladies parodontales, on observe 3 fois plus de risque de perte d’implants (OR =3,02, 95% CI 1,12-8,15) et une perte moyenne d’os peri implantaire plus importante par rapport à des patients sains (moyenne = 0,61 mm, 95% CI 0,14-1,09) Méta analyse de Syarida H et Coll 2009.  De plus, il y a neuf fois plus de risque de peri implantite chez des patients présentant un ATCD de maladie parodontale par rapport à des patients sains (RR=9 95% CI 3,94-20,57) (Karoussis et Coll, 2003 : étude sur 10 ans). Ce risque est diminué de 20% lorsque des implants à col lisse sont utilisés par rapport à des implants à col rugueux (Revue Cochrane d’Esposito et Coll 2007) Cependant à 5 ans, il n’y a pas de différence statistiquement significative au niveau de la perte de la supra structure implantaire entre des patients présentant un ATCD de maladie parodontale et des patients sains (Hardt et Coll 2002).

Cas clinique 1

  • Patient présentant une parodontite modérée, localement sévère (la profondeur des poches est annotée sur la photo 1).
  • Absence de 14
  • Ancien fumeur
  • Adressé par son dentiste pour un avis parodontal, car le patient se plaint de douleurs gingivales

Consulter l'article avec les photos  en pdf.

 

Photo 1 : Bilan long cône et vues cliniques initiales
Après la thérapeutique initiale (photo2) on observe :

  • La persistance d’une poche de 6 mm entre 16 et 17 associée à un défaut de point de contact
  • Une poche de 7 mm sur 26 et 27 associée à une lésion de furcation de classe 3 sur 26 et 27

 


Photo 2 : vues cliniques après la thérapeutique initiale

Un traitement parodontal chirurgical sera donc entrepris afin de neutraliser les poches parodontales résiduelles.  Au niveau du secteur 1 une couronne provisoire a été mise en place afin de restaurer le point de contact et un lambeau d’assainissement a été réalisé (photo 3).26 et 27 ont été extraites (photo 4).


Photo 3 : vue clinique secteur 1  

 
Photo 4 : vue clinique secteur 4 après extraction

A la réévaluation (2 mois après la thérapeutique chirurgicale) aucune poche parodontale ne persiste. A ce moment là et pas avant , il peut être envisagé de poser des implants en place de 14 26et 27 (photo 5 et 6).

 


Photo 5 : Scanner pre implantaire et vues cliniques pendant la mise en place de 14 et après cicatrisation

Au niveau du secteur 2, un sinus lift avec 2 implants 26 et 27 est à prévoir (photo 6).

 


Photo 6 : Retro alvéolaire et vue clinique du secteur 2, 3 mois après extraction de 26 et 27


Cas clinique 2

 

  • Patiente présentant une parodontite sévère généralisée (photos 7)
  • Prévoir extraction de 14

 


Photos 7 : Vues cliniques et radiologiques initiales


Une thérapeutique non chirurgicale a été entreprise. Après réévaluation, on note :

  •  une persistance de poches parodontales sur (16,17 et 18) et (26,27) (photo 8)
  • une mobilité type 3 du bloc incisivocanin mandibulaire. Une  contention fibrée est réalisée (photo 9).

Photos 8 : Vues cliniques après réévaluation

 


Photo 9 : Les phases cliniques de la mise en place d’une contention collée avec un composite fibré.

Un traitement chirurgical a été décidé au niveau des secteurs molaires 1 et 2 afin d’éliminer les poches résiduelles. Un lambeau déplacé apicalement avec ostéoplastie a été réalisé (photo 10).

 


Photo 10 : vues cliniques après dégranulation et ostéoplastie


2 mois plus tard, à la réévaluation aucune poche parodontale n’est observée. A ce moment et pas avant un  traitement implantaire peut être envisagé. 14 est remplacé par un implant en technique de Summers (photo 11).

 


Photo 11 : vue clinique et radio retro alvéolaire le jour de la pose de l’implant au niveau de 14

Après ostéointregration de l’implant, la couronne définitive de 14 a été posée. Une thérapeutique parodontale de soutien tous les 6 mois a été mise en place afin de maintenir les résultats et d’assurer la pérennité implantaire. 4 ans après le début du traitement,  on pourra noter la bonne santé des tissus parodontaux (photo 11).


Photo 12 : Panoramique dentaire et vues clinique à J+4 ans


Conclusions


Un traitement implantaire est possible chez des patients ayant ou ayant eu  des problèmes parodontaux. Cependant, un traitement parodontal devra être réalisé avant le traitement implantaire. Dans le cas contraire, des agents pathogènes pourront contaminer la surface implantaire à l’origine de peri implantite. De plus, les patients ayant un antécédent de maladie parodontale devront être informés des risques d’échec et de péri implantite augmentés par rapport à des patients sains. Enfin, ces patients devront avoir un suivi implantaire et parodontal plus régulier afin d’assurer la pérennité de leurs traitements.

 

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LS65, Spécial greffe osseuse


Bibliographie:

1. Armitage, G. C. Development of a classification system for periodontal diseases and conditions. Ann. Periodontol. 4, 1–6 (1999).

2. Berglundh, T., Persson, L. & Klinge, B. A systematic review of the incidence of biological and technical complications in implant dentistry reported in prospective longitudinal studies of at least 5 years. J. Clin. Periodontol. 29 Suppl 3, 197–212; discussion 232–233 (2002).

3. Esposito, M., Ardebili, Y. & Worthington, H. V. Interventions for replacing missing teeth: different types of dental implants. Cochrane Database Syst Rev 7, CD003815 (2014).

4. Flemmig, T. F. Periodontitis. Ann. Periodontol. 4, 32–38 (1999).

5. Hardt, C. R. E., Gröndahl, K., Lekholm, U. & Wennström, J. L. Outcome of implant therapy in relation to experienced loss of periodontal bone support: a retrospective 5- year study. Clin Oral Implants Res 13, 488–494 (2002).

6. Karoussis, I. K. et al. Long-term implant prognosis in patients with and without a history of chronic periodontitis: a 10-year prospective cohort study of the ITI Dental Implant System. Clin Oral Implants Res 14, 329–339 (2003).

7. Safii, S. H., Palmer, R. M. & Wilson, R. F. Risk of implant failure and marginal bone loss in subjects with a history of periodontitis: a systematic review and meta-analysis. Clin Implant Dent Relat Res 12, 165–174 (2010).