Laser CO2 et environnement mucco-gingival péri-implantaire

Intérêt d'une technologie laser non pénétrante, le laser CO2 et son utilisation sur les tissus mous péri-implantaires.

Auteur : Robert Fromental

I- INTRODUCTION

L'Implantologie dentaire a considérablement évolué depuis ces deux dernières décennies. La demande des patients est de plus en plus forte, le nombre de praticiens exerçant cette discipline s'en trouve majoré.
Il est intéressant de souligner, qu’une grande partie de l'évolution des paradigmes s'appuie sur la mise en œuvre de la part des industriels, de matériels de plus en plus performants, à haute technicité, permettant de développer des stratégies thérapeutiques innovantes, intégrant l'approche numérique sous toutes ses formes (radiologie, (process CAD CAM etc.)
Les Lasers en font partie, le développement de leurs applications dans le domaine de la dentisterie s'impose, que ce soit pour les Lasers dits pénétrants (Diode, ND-Yag) ou non pénétrants (CO2, ER-Yag) en fonction de leur longueur d'onde.
Le but de cet article est de présenter, d’une manière succincte, l'intérêt d'une technologie laser non pénétrante, le laser CO2, et de mettre en évidence son utilisation sur les tissus mous péri-implantaires.


II- HISTORIQUE

L’interaction médecine et technologies a apporté une grande avancée dans le domaine médical. La première apparition des lasers date de 1960 (TH. MAIMAN) appuyées par les bases théoriques de A. EINSTEIN 1917.L'utilisation des lasers en odontologie date des années 80.

Le LASER CO2 a été inventé par KUMAR PATEL en 1960 (labo Bell- Lab.)

  • Le Laser CO2 émet la longueur d'onde 10.6 µm qui est très efficacement absorbée dans l'eau (pénétration de 30 µm seulement) (fig. 1)
  • Tissu mou composé d'eau 75-95%, donc absorption efficace dans tout le tissu mou, indépendamment de sa pigmentation
  • L'énergie absorbée dans le tissu est instantanément transformée en chaleur.
  • Le tissu est vaporisé au point d'impact (« ablation ») avec un très faible effet thermique périphérique (0.1-0.3 mm)
  • « Ce que vous voyez est ce que vous obtenez »
  • Dans la zone de nécrose, les vaisseaux sanguins (jusqu'à 0.5mm) sont coagulés. Le saignement est sensiblement réduit…

Il fonctionne en mode continu, pulsé, Ultra pulsé, sa puissance peut être de 15 wtts ou 25 wtts, avec des plages variables d'utilisation en fonction des indications. (Incision, ablation, coagulation, selon le mode Focalisé ou défocalisé.. )


fig. 1 – Place sur le spectre électromagnétique des lasers

Quelques questions :


1 - Pourquoi utiliser la technologie Laser C02 en implantologie ?
Voir Biblio. Miserendino LI et coll.
L’application va se faire essentiellement au niveau des tissus mous (absorption):
Elle inclut :
- L'hémostase
- La protection des tissus environnants
- La réduction de l'œdème, l'infection, douleurs postopératoires
Et surtout permet une visualisation du travail effectué.


2 - Quel impact peut-il avoir sur le succès des implants?
L'impact est lié à sa longueur d’onde :
- absorbé par l'eau des tissus
- peu ou pas d'absorption de l'énergie sur la surface du métal, donc n'altérant pas ou peu la surface implantaire
- action hémostatique sur les petits vaisseaux
Par contre risque de nécrose sur le tissu osseux, sans refroidissement)
Voir Biblio : CHU RT et coll.


 3 – Y a –t-il des situations cliniques ou l’emploi de ce type de laser est un excellent choix ?
Le domaine de prédilection du Laser CO2 est lié à sa grande capacité de coupe (mode focalisé) et l'ablation par peeling (mode défocalisé) et par son absorption par l'eau des tissus.
Voir Biblio : Walsh LI – Mouhyi J et coll. – Romanos Ge


III-APPLICATIONS CLINIQUES EN IMPLANTOLOGIE DU LASER C02


    
Fig.  2 et Fig. 3 – Effet de vaporisation sur les tissus mous péri-implantaires pour préparer l’esthétique gingivale

Elles relèvent de l'expérience acquise sur son utilisation autour de l'organe dentaire à savoir :
1. Peeling gingival post-chirurgical
2 Préparation sulculaire en prothèse fixée
3. Restructuration dentinaire

 


Gingivoplasties

-
Fig. 4 – Préparation sulculaires et résultats


Préparations sulculaires avant empreinte

 


Fig. 5 – Une préparation sulculaire fine permet un résultat prothétique esthétique


Suppression des brides et des freins


Fig. 6 – La suppression des tensions favorise la tenue des appareils de prothèse


Le LASER CO2 au service de l’implantologie

 


Fig. 7 – Le laser CO2, un outil performant en Implantologie


Les tissus mous péri-implantaires représentent une barrière entre le milieu externe et le milieu interne, les implants émergent dans le milieu buccal en étant entourés par les tissus mous, qui se différencient des tissus péri-dentaires par leur origine embryologique et histologique.
Voir lectures conseillées.


L'attache péri-implantaire

 


Fig. 8 – Comparaison des attaches parodontales sur les dents naturelles et en Implantologie

 


 Fig. 9 – Exemple de jonctions os/implants et gencive/implants après utilisation des techniques lasers assistés

Peeling de la muqueuse de recouvrement implantaire, implants placés en "one step"


Fig. 10 – Vaporisation gingivale au laser CO2 avant réalisation de la prothèse implanto-portée

Élimination des brides et des freins tensionnels :

La tension sur la muqueuse provoquée par la présence d'une bride est préjudiciable à long terme au maintien de l'os crestal et peut être responsable de rétraction muqueuse, le morphotype gingival épais joue un rôle important dans cette stabilité. Il est nécessaire d'éliminer cette tension par une procédure d'approfondissement vestibulaire.


Fig. 11 – Élimination d’une bride au laser CO2

 

Fig. 12 – Gingivoplastie et approfondissement vestibulaire au laser CO2

 

APPROCHE DU 2ème TEMPS CHIRURGICAL

Le deuxième temps chirurgical est l'intervention qui consiste à l'ouverture de la muqueuse, après la phase d'ostéointégration en technique enfouie.
Elle peut se réaliser de 2 façons :
- à l'aide d'une lame froide (technique invasive)
- à l'aide du Laser CO2 (mini invasive)
Cependant le choix chirurgical sera dépendant de l'évaluation de la muqueuse "gencive attachée", présente dans la zone du col implantaire.
En présence d'une muqueuse épaisse, l’utilisation du Laser peut être envisagée, sous réserve d'une localisation correcte du col de l'implant.
En présence d'une muqueuse dite alvéolaire, l’utilisation d'une technique lame froide va se révéler plus indiquée, afin de renforcer dans le même temps le bandeau collagénique par une translation vestibulaire de ce lambeau décalé.
Une intervention combinant la lame froide et le laser, peut se révéler utile, pour recréer un environnement muqueux stable à long terme.

 

Fig. 13 – Utilisation mixte lame froide et laser CO2 pour créer un environnement favorable

 

CONCLUSION

Cet article met en évidence quelques capacités non exhaustives du Laser CO2 pour modifier, préparer et permettre la stabilité tissulaire péri-implantaires.

Il est bien évident que de multiples autres indications peuvent être envisagées à savoir :

- Création de profils d'émergence pour l'adaptation de la prothèse implantaire aussi bien dans les régions maxillaires ou mandibulaires postérieures qu’antérieures, ou les exigences esthétiques sont prédominantes.

- Préparations sulculaires sur piliers droits ou angulés en prothèse scellée, pour permettre une empreinte soit conventionnelle ou optique, optimisée.

- Traitement de détoxification des implants dans le traitement des péri-implantites.

- Création de papilles dans les cas d'édentement maxillaire antérieur.

L'utilisation rationnelle de ce type d'outil thérapeutique ne doit se faire qu'après une connaissance approfondie de son fonctionnement, de la puissance à appliquer, du mode opératoire (focalisé ou défocalisé, continu, pulsé ou ultra pulsé) et une formation universitaire adaptée.

 


Bibliographie
Misérendino LJ, Pick RM. Lasers in dentistry. Chicago : Quintessence Publishing; 1995.
Chu RT, Watanabe L, White JM, Marshal GW, Marshal SJ, Hutton JE. Temperature rises and surface modification of lased titanium cylinders. J Dent Res 71(Spec Iss): 144
 Walsh LJ. The use of lasers in implantology: an overview. J Oral Implantology 1992;18: 335
 D. Mouhyi J, Sennerby L, Wennerberg A, Louette P, Dourov N, van Reck J. Re-establishment of the atomic composition and the oxide structure of contaminated titanium surfaces by means of carbon dioxide laser and hydrogen peroxide: an in vitro study. Clin Implant Den Relat Res 2000;2(4):190–20
Romanos GE. Laser surgical tools in implant dentistry for the long-term diagnosis of oral implants. Int Cong Ser 2004;1248:112-3

Lectures conseillées
Radiographical and histological caracteristics of submerged and non submerged titanium implants. An experimental study in the labrador dog. Clinical oral implants research Vol 7 -N°1 – March 1996

 

ROBERT FROMENTAL